la formation, c’est notre droit
Il n’y a pas de droits sans devoirs. Les droits des uns sont toujours définis par les devoirs des autres. Pour reprendre la segmentation d’André Comte-Sponville, il existe deux grands types de droits, « les droits de », qui sont « des droits-libertés » (droit de vivre, droit d’expression, droit de circulation, droit de propriété…) et « les droits à », « les droits-créances » (à la santé, au travail, à l’éducation, au logement…).
Les premiers, les droits-libertés, sont toujours définis de l’extérieur, venus d’une obligation négative – une interdiction. Le droit de vivre par l’interdiction du meurtre, le droit d’expression par l’interdiction de la censure, etc. Les seconds, les droits-créances, sont définis positivement, non par un simple interdit, mais par une obligation.
Il en va un peu différemment du droit à la formation. Si j’ai le droit de me former, c’est que nul n’a le droit de m’en empêcher – c’est vrai. Si j’ai le droit à me former, c’est que quelqu’un est dans l’obligation de me proposer la formation que je désire – c’est également vrai…
Ce droit « à » et « de » des salariés et, associé, ce devoir des entreprises, Muriel Pénicaud les a eus clairement en tête au moment de lancer l’application MonCompteFormation, elle qui connait les transformations en cours, leur violence inouïe, leur portée immense et leur survenue inéluctable. « Quatre clics sur l’application, et c’est fait. Ça va changer la vie des gens ». Ce n’est rien de le dire : une première mondiale, 25 millions d’actifs concernés, 100.000 sessions de formation déjà disponibles – pour 50% des emplois impactés par l’IA et un besoin estimé à 105 heures pour se former d’ici 2022… « C’est une réforme ? Non, Sire, c’est une révolution ! ».
Comme l’écrit Yuval Noah Harari, « créer de nouveaux emplois et reformer les gens pour les exercer ne sera pas un effort unique. La révolution de l’IA ne sera pas une ligne de partage des eaux après quoi le marché de l’emploi retrouverait un nouvel équilibre. On assistera plutôt à une cascade de perturbations toujours plus grandes. D’ores et déjà, peu d’employés peuvent espérer faire le même travail toute leur vie. En 2050, l’idée d’un emploi à vie mais aussi l’idée même d’une profession à vie pourraient bien nous paraître antédiluviennes. Même si nous pouvions constamment inventer de nouveaux emplois et reconvertir la main d’œuvre, l’homme moyen aurait-il l’endurance émotionnelle nécessaire à une vie de perpétuels bouleversements ? »
Si on suit l’auteur de Sapiens, l’homme devra sans cesse adapter ses connaissances – moins « de plus » et plus « de mieux » – et ses compétences, sans doute autour des 4 C (pensée Critique, Communication, Créativité et Collaboration), tout en musclant sa capacité à faire face au changement permanent, à apprendre des choses nouvelles et à préserver son équilibre mental face à des situations peu familières…
Muriel Pénicaud ne s’y est pas trompée, qui préfère protéger les femmes et les hommes plutôt que les emplois. Quand bien même on le mesure encore mal aujourd’hui, la formation, à l’école et à l’université, puis professionnelle et continue, sans doute orientée vers les « soft skills » plutôt que vers les « hard skills », sera tant pour l’entreprise que pour les salariés l’enjeu majeur des années qui viennent…
Du coup… toutes et tous à notre appli !