Le dernier livre d’Hugo Boris commence par un aveu. Il y a quelques années, alors même qu’il venait d’obtenir sa ceinture noire de karaté, il assiste à une altercation dans le RER B. Paralysé par la peur, ce genre de peur qui vous prive de jambes, de bras, de tout, il n’intervient pas ; il se contente de tirer le signal d’alarme. Ce souvenir, dont il observera au fil des ans des répliques, le hante : que dit-il de lui, de son caractère, de sa personnalité ? Le livre s’appelle Le courage des autres. Il est très beau. Sur la base de cette panique originelle et répétée, c’est une sorte d’herbier, une série d’instantanés, des vignettes écrites sur le vif, dans les transports en commun, qui en disent beaucoup sur les autres, voyageurs, inconnus, touristes – et naturellement sur lui.
Hugo Boris abat d’emblée les cartes : La vie est un processus au cours duquel vos points les plus faibles seront infailliblement découverts. C’est une citation de Julian Barnes. Rien n’est plus exact : la vie est bien cette machine à rayons X, et le travail plus encore, où on n’échappe pas à soi, ses faiblesses, ses carences, ses travers. Sur la durée, tout apparaît… le bon aussi, d’ailleurs…
L’entretien de recrutement est-il aussi un processus au cours duquel nos points les plus faibles sont infailliblement découverts ? Infailliblement non. Mais ils apparaissent, aux yeux des chasseurs, sous forme de pistes à creuser, de questions, de doutes. Chaque candidat doit faire avec : de la même manière que la peur n’éloigne pas le danger, le mensonge (ou le travestissement) n’éloigne pas la réalité, Sur la durée, tout apparait…
Il faut toutefois rester positif : heureusement que nous sommes ce que nous sommes, avec nos forces et nos faiblesses. Mais à l’instar d’Hugo Boris, il nous faut aussi de la lucidité pour reconnaître nos faiblesses. Du courage pour les affronter. De la volonté pour les corriger… et du support (feed-back, bienveillance, conseils) pour nous accompagner et nous soutenir… dans la vie comme au bureau…